La poésie cristallise les émotions

La poésie de Marie-Clotilde Roose

Bruna Bonino

Photo: Bruna Bonino

À Pierre,

Que faisons-nous de ces
absences ?

Les âmes sont-elles
comme ces bateaux
qui franchissent la ligne
de l’horizon ?

Nous aimerions qu’elles reviennent
toutes voiles dehors
nous raconter les merveilles
qu’elles ont vues.

Il nous reste la grève
le sable d’or où
enfoncer les pieds
en souvenir du soleil –

ces poussières d’étoiles
nous pétrissant
nous, pétris d’elles

qui rejoignons un jour
l’humble horizon
la ligne bleue.

*

Dans la nuit claire de juin mon enfant dort comme un calice
j’effleure sa peau : pétale soyeux, où rêvent quelques perles
de sueur odorante, miel et musc mêlés

chaque enfant est une fleur unique et je pleure en silence
une peine immobile, tendue de cercle en cercle
déposée dans la paume invisible du Ciel
pour tous ceux que la guerre et la violence des hommes
froissent injustement

fleurs à peine écloses
jetées piétinées
dans la terreur indélébile
le fracas et le sang

alors que nul n’est capable de recréer, une fois brisé
un tel miracle
de sereine beauté

Marie-Clotilde Roose©

MC Roose par F Lison-Leroy 09.12.2014 (2)

Quand avez –vous commencé à écrire ?

J’ai commencé à écrire à l’âge de treize ans, en réaction aux flots de mauvaises nouvelles diffusées à la radio, qu’écoutait mon père.  « Ne me parle plus de… » (description d’éléments négatifs) « Mais parle-moi de… » (éléments positifs, dynamisant) étaient les premiers mots de l’ado poète, en révolte et en attente d’autre chose.

Comment définiriez-vous la poésie ?

Permettez-moi de reprendre une courte définition de la poésie, envoyée à Laurence Pieropan pour un colloque :

«La poésie est une pensée fugace, saisie dans quelques paroles aptes à la transcrire.  Selon que cette pensée est articulée, portée par un souffle puissant, ou plus concise – à la manière d’un aphorisme – elle se traduira en poème plus long ou plus bref.  C’est un rythme qui la porte ; il s’impose au poète.  La musicalité et le souffle interne au poème sont des éléments clés de sa signification.»

J’ajouterai ceci : La poésie cristallise des émotions ; elle est intimement liée au vécu du sujet, même si elle le transcende sa singularité, pour atteindre, parfois, une portée universelle.  Sans être nécessairement narrative, elle témoigne d’une histoire, si brève soit-elle.  Elle en est la résonance, capable de toucher un autre être humain, de le faire vibrer à son tour.

Biographie
Née à Bruxelles en 1970. A donné naissance à son plus beau poème : Emmanuel. Enseigne actuellement la philosophie et la sociologie de l’art en Province de Hainaut. Thèse présentée à Lyon 3 sous la direction de Jean-Jacques Wunenburger : ” Désir d’être et parole poétique. De la tentative phénoménologique à la tentation métaphysique “, Prix Charles Plisnier 2006. Animatrice du Cercle de la Rotonde, favorisant la rencontre entre auteurs débutant et confirmés, au Théâtre-Poème à Bruxelles, en partenariat avec la Maison du Livre de Bruxelles. Publie des articles culturels, de critique littéraire ou philosophique, des poèmes,…Nombreuses parutions en anthologies, dont Les nouveaux poètes francophones, de Jean-Luc Favre et Matthias Vincenot (Ed. Jean-Pierre Huguet, 2004), L’année poétique 2005 (Seghers), Poètes aujourd’hui et La nouvelle poésie française de Belgique (Liliane Wouters et Yves Namur, Le Taillis Pré, 2007 et 2009). A pratiqué aussi le chant et l’écriture radiophonique (docu-fictions pour France-Culture).

Bibliographie
Recueils
L’orange soleil. Amay : L’Arbre à paroles, 1994.
Le mur immense de la nuit. Paris : Caractères, 1994.
Les chemins de patience. Brandes, 2004.
Tourment. Châtelineau, Le Taillis Pré, 2005.
Le poème quotidien, Les Déjeuners sur l’herbe, 2014.

Publications en revues : Le Journal des Poètes, Sources, L’Arbre à paroles, Sud, Lieux d’Etre, Le Cercle de la Rotonde, MUZE (Kent County Council), Les Messagères du poème (Paris), L’indicible frontière

Anthologies : Belgian Women Poets : an anthology (Renée Linkhorn et Judy Cochran, Peter Lang Publishing, New York, 1999), Le siècle des femmes de Liliane Wouters et Yves Namur (Ed. Les Eperonniers, 2000), Les nouveaux poètes francophones, anthologie de Jean-Luc Favre et Matthias Vincenot (Ed. Jean-Pierre Huguet, 2004), Anthologie des lettres belges (à partir de 1940) traduite et éditée en Hongrie (à Budapest), C’est pas tout rose et violette du Concours Tec-Criac 2002, à Lens, J’appelle un mot d’Unimuse, Tournai 2003.

Préface de la monographie du peintre Lode Keustermans, Le Cantique des Cantiques (1990).

Prix littéraires
Prix Georges Lockem de l’Académie Royale pour L’Instant vert (1991); Prix Charles de Trooz (U.C.L.) pourL’orange soleil (1991); Prix de la Biennale Robert Goffin pour De feu et de froid (1996); Prix international René Lyr pour Les chemins de patience (1999); Aide du Fonds national de littérature de l’Académie Royale et Prix Geneviève Grand’Ry pour Les chemins de patience (2000). Lauréate du concours RTBF-Hainaut « Un auteur… une voix » (2001); Prix Hubert Krains pour Tourment (2004).

http://www.lecercledelarotonde.be/

Source de Biographie e Bibliographie: http://www.maisondelapoesie.be

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